Il est peu de dire que l’industrie automobile des années 50 n’accordait que très peu d’intérêt aux femmes. Sauf un. Harvey J. Hearl le big Boss du design de General Motors.
Avant gardiste; il est aussi au niveau des moeurs. C’est l’un des premiers à embaucher une femme designer, Helene Rother en 1943. Après la seconde guerre mondiale, les villes américaines se développent et avec elles les banlieues résidentielles (Brie Van de Camp n’est pas très loin). Il est donc nécessaire d’avoir deux voitures, une pour le travail de monsieur et une autre pour madame… qui reste à la maison mais qui a besoin de faire des navettes. Leur avis en matière automobile commence donc à compter.
Des designeuses pour General Motors
Pour vendre des voitures aux femmes, Harvey Earl à l’idée marketing de les associer au processus de conception. En 1955, il se rend à l’Institut Pratt de Booklyn à New York, principale école d’art des Etats-Unis, pour trouver des candidates. Il trouve son bonheur auprès de 7 candidates que GM baptisera vite« Damsels of design » (les demoiselles du design). Elles viennent coompléter les équipes déjà en place.
Elles se rendent à Detroit. Six travaillent dans les studios des marques GM : deux à Chevrolet, une chez Buick, Cadillac, Oldsmobile et Pontiac. Trois autres travaillent pour Frigidiare, filiale électro-ménager de GM et doivent réfléchir à la cuisine de demain.
Festival de la mode féminine automobile
Les « Damsels of design » ont un studio dans lequel elles testent, les couleurs, les garnitures ainsi que les détails de finition sous la houlette du « Patron » Harley J. Earl. Conscientes d’être de vraies pionnières en la matière, la consécration vient au printemps 1958. GM organise le Festival du printemps de la mode des designeuses automobiles soit en anglais « the Spring Fashion Festival of Women Designed Cars ».
L’événement est organisé sous le nouveau General Motors Styling Dome. aux toiles de soie rouge. 10 voitures sont présentées avec leurs innovations en matière de design et de « voiture à vivre ». Le dôme est drapé de tissu rouge tel un chapiteau sous la houlette de Gere Kavanaugh, styliste reconnue. Les cinq plateformes sont décorées de jacinthes en pot. Trois gigantesques cages descendent du dôme et abritent une centaine de canaries. La touche féminine est bien là. A l’origine, chaque studio a été missionné pour présenter deux voitures. D’abord destinées à être dévoilées en interne, elles rejoignent vite la salle d’exposition du siège principal de General Motors à Detroit pour être exposées au public.
Des voitures à vivre : Tissu, rangements, sécurité
Il faut dire que le résultat n’a rien à envier aux productions actuelles. En témoigne la proposition de Jeannette Linder et son Impala Martinique, cabriolet jaune nacré et blanc, garni avec un tissu d’ameublement très chic de quatre couleurs. Un ensemble de bagages assortis complète la panoplie. Enfin, miroirs de maquillage et vanity incorporé dans la boîte à gants ajoute la touche féminine… côté passager.
Ruth Glennie a proposé sa vision de la Chevrolet Corvette avec housse de siège interchangeable suivant les saisons, jaune pour l’été, noire pour l’hiver. La couleur de caisse Olive métallisée lui sied à merveille. La Fancy Free Corvette proposait également une console de rangement pour jumelles et caméra et des ceintures de sécurité rétractables.
Pour Buick, Marjorie Ford Pohlman et sa Shalimar, un haut de gamme violet et noir avait un dictaphone dans la boîte à gants pour ne rien oublier des rendez-vous de la journée !
Peggy Sauer s’est attaquée, quant à elle, à la familiale Oldsmobile Fiesta Carousel dans un bleu métallique. C’est la voiture à vivre, conçu pour le « bien voyager » des enfants.
Au dos de la banquette avant, une plaque magnétique avec un système d’élastiques, permet de fixer les jouets. Les portes avant comportent des porte-parapluie et un ingénieux système électrique permet déjà de condamner les portes et fenêtres arrières. On a rien inventé.
Des fortunes diverses pour les designeuses
Sur les 10 voitures c’est l’Impala Martinique qui gagna les honneurs du vote du public. La corvette fini troisième c’est d’ailleurs la seule encore visible aujourd’hui. A noter que Sue Vanderbilt est devenue directrice adjointe du studio Cadillac.
De cette expérience elle retiendra ceci : « nous avons prouvé aux hommes que nous ne sommes pas dans l’entreprise uniquement pour ajouter de la dentelle ou des strass au tapis mais bien pour rendre les voitures attrayantes et utiles aussi bien pour les hommes que pour les femmes ». Malheureusement, ses collègues ont eu du mal à survivre au départ de Harley J. Earl, le visionnaire.
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